La thématique 2019

Dossier réalisé par Steven Pravong en collaboration avec Cyrielle Dozières

Le fantôme Hantises du passé et cinéma de l’invisible

Nous sommes imprégnés des récits de hantises et de fantômes qui abondent dans les traditions populaires mondiales. Nous avons tous entendu parler de ces perturbations de l’environnement domestique et de ces forces qui agissent mystérieusement sur la matière. Les histoires mettant en scène esprits frappeurs, ectoplasmes et résidences possédées (avec ingérences démoniaques) sont des constantes culturelles.

Des pulsions mystérieuses nous poussent à vouloir entrer en contact avec le monde des morts cependant le spiritisme nous inspire les ridiculisations les plus acerbes. Nous n’avons aucune envie de nous faire mystifier par des charlatans (qui méritent des coups de pieds occultes). Alors que faire ?

Écartons donc les services d’un extralucide et de ses accessoires ésotériques, et optons pour un stratagème mieux toléré : celui de la fi ction et d’un media (médium ?) associé. Convoquons le cinéma, la série, la littérature et les autres expressions artistiques. Une fois l’obscurité faite dans la salle ou dans nos propres cerveaux, nous serons dotés de la capacité de dialoguer avec l’au-delà.

Cette année, Court Métrange consacre sa thématique aux fantômes (vous l’aviez compris). Évidemment, ça va être mortel.

Pour les choses de l’esprit, citons les interventions de l’artiste vidéaste Jean-François Robic, de l’ingénieur-écrivain du son Daniel Deshays, du philosophe Kevin Capelli, du maître de la série Pacôme Thiellement, du scénariste-réalisateur Hubert Blanchard et de l’auteur-éditeur Guy Astic. Pour les pupilles gustatives, le Naïa Museum a de nouveau recruté des mercenaires de l’art fantastique qui en savent long sur la revenance. Comme si ça ne suffi sait pas, un double programme Long Métrange aussi alléchant qu’exigeant vous est proposé avant le lancement de la compétition. À tout ceci s’ajoute une JounÉtrange intrigante destinée à tous les publics.

Mortelle, la programmation de courts métrages concoctée par nos sélectionneurs le sera aussi à l’évidence. Si elle n’effl eure notre thématique que par endroits (pour les raisons qu’on imagine), on doit sa richesse et sa variété à un fantastique international d’une formidable vitalité. La présidence du jury offi ciel de cette seizième édition est assurée par l’un des plus grands réalisateurs actuels : Pascal Laugier.

Très loin du banal manipulateur d’un fantastique codifié, l’homme est un expérimentateur avisé du genre. Préoccupé par la question du mal dont il offre les représentations les plus dérangeantes, il sonde témérairement ses propres tourments et la dangerosité du monde (avec un usage modéré de la concession). De l’entreprise naissent des oeuvres fascinantes et d’une prodigieuse angoisse (pour être en dessous de la réalité). Des grands films, beaux et désespérés, dans lesquels on ne sent jamais faillir l’affection du créateur pour ses héroïnes blessées.

Chez celui à qui nous devons (entre autres) le traumatique Martyrs et le vertigineux Ghostland, l’acte de fi lmer n’est pas un exercice anodin. Il est un geste artistique, intime et brutal, qui laisse le spectateur aussi ébloui que sonné.

Les films de Pascal Laugier, éminemment liés à la personnalité de leur auteur, sont de vraies leçons pour les réalisateurs en germination. C’est dire si nous ne sommes pas peu fiers de l’accueillir chez nous, chez vous, à Court Métrange !
 

STEVEN PRAVONG
PRÉSIDENT ET COFONDATEUR